Résumé
C’est un vieil homme debout à l’arrière d’un bateau. Il serre dans ses bras une valise légère et un nouveau-né, plus léger encore que la valise. La petite fille de Monsieur Linh.
Le vieil homme est seul désormais à savoir qu’il s’appelle ainsi.
Debout à la poupe du bateau, il voit s’éloigner son pays, celui de ses ancêtres et de ses morts, tandis que dans ses bras l’enfant dort.
Le pays s’éloigne, devient infiniment petit, et Monsieur Linh le regarde disparaître à l’horizon, pendant des heures, malgré le vent qui souffle et le chahute comme une marionnette.
Mon ressenti
Monsieur Linh est un vieil homme qui fuit la guerre dans son pays, après la mort de sa famille. Il n’a pour seuls bagages qu’une valise et sa petite fille qu’il chérit. Il lui a promis des jours meilleurs dans un autre pays. Monsieur Linh arrive en France ou ailleurs. Du moins, me semble-t-il car le narrateur ne le précise pas. Tout comme nous ignorons de quel pays il est originaire. On le devine grâce à certains indices. Mais au final, ce n’est pas ce qui compte dans ce très court récit.
L’intérêt de ce texte c’est la manière dont Philippe Claudel aborde le déracinement, l’immigration forcée. La barrière de la langue, qui n’empêche finalement pas le vieil homme de se lier d’amitié avec Mr Bark, un homme qu’il croise sur le banc d’un parc. Mr Bark est bavard et Mr Linh l’écoute parler, même s’il ne comprend pas un traitre mot de ce qu’il dit. Certains passages font sourire, notamment un quiproquo au moment où Mr Bark se présente et que Mr Linh lui répond Tao-Lai. L’homme pense alors que c’est son nom alors que cela signifie « bonjour » dans la langue natale du vieil homme. Et Mr Linh de penser que dans ce drôle de pays on se dit souvent bonjour.
C’est un texte plein de tendresse et de pudeur qui nous est offert par l’auteur. J’ai mis un peu de temps à rentrer dans l’histoire, ne sachant pas trop où il voulait en venir. Mais plus j’avançais dans l’histoire, plus je voyais venir la chute de l’histoire. Cette chute que certains annoncent comme surprenante, je pense l’avoir comprise assez rapidement (l’auteur glisse de nombreux indices). Mais cela ne m’a pas dérangée car ça m’a finalement rendue encore plus curieuse.
C’est aussi un roman troublant. Un roman qui ne laisse pas indifférent. Un roman , très court, mais qui vous prend aux tripes par sa force. Même s’il ne se passe finalement pas grand chose, c’est la manière dont le texte est écrit qui donne toute sa puissance à ce récit. La narration fait que le lecteur se met sans cesse à la place de Mr Linh qui découvre un pays qu’il ne connaît pas (et qu’on ne connaît pas nous non plus). Tout comme lui, nous ne savons pas où il va et nous découvrons en même temps que lui ce qui lui arrive. C’est une sorte de narration introspective, de monologue intérieur.
Magré un démarrage en douceur, c’est vraiment une très bonne lecture. La petite fille de Monsieur Linh mérite une seconde lecture, à mon humble avis. Afin d’accéder à tous les messages laissés en filigrane par l’auteur.
Mes challenges
Cette lecture m’a permis de valider la catégorie 99 du challenge annuel. Lire un livre de moins de 200 pages.
Eh bien, voilà un livre que je relirais volontiers. Je me souviens l’avoir beaucoup aimé au contraire d’autres romans de l’auteur comme « Les âmes grises », par exemple.