Résumé
«Moulin de Pologne, pourquoi ce nom ? Personne n’en sait rien. Les uns prétendent qu’un pèlerin polonais allant à Rome s’établit jadis à cet endroit-là dans une cabane.Un peu après la chute de l’Empire, un nommé Coste acheta le terrain, fit construire la maison de maître et les dépendances qu’on voit encore.Coste était un enfant du pays, mais il y revenait après un long séjour au Mexique. C’était, paraît-il, un homme maigre et silencieux. On se souvient surtout de ce qui le caractérisa : des sautes d’humeur violentes qui le faisaient passer sans transition d’une bonté de pain à une cruauté famélique.»
Mon ressenti
Quelle drôle de lecture que ce petit livre de Jean Giono. Je dois vous avouer que c’est mon premier roman de cet auteur. Je connais un peu L’homme qui plantait des arbres car mon fils l’a étudié cette année avec sa maîtresse, et cela m’avait donné envie de découvrir la plume de cet auteur.
Récit d’une famille frappée par le malheur
Le moulin de Pologne relate la vie de la famille Coste. Le père Coste a perdu sa femme et ses deux fils coups sur coup, de mort violente. Persuadé d’être maudit, il fait tout pour mettre à l’abri ses deux filles. Il veut leur trouver à chacune un mari, à qui il n’arrive rien. Il cherche deux hommes oubliés de Dieu. Deux hommes dont la famille n’a jamais été touchée par l’infortune, mais aussi à qui la chance ne sourit pas spécialement. Il cherche juste deux hommes à qui « rien n’arrive jamais ».
Pour cela il est aidé d’une femme assez particulière, une entremetteuse : Mme Hortense. Elle suivra la famille Coste jusqu’à la fin de sa vie. Elle finit par trouver deux hommes, deux frères. Leur famille est propriétaire de leur terrain depuis plusieurs générations. Jamais la chance ne leur a souri au point d’agrandir leur propriété, et jamais la malchance ne les a touchés au point de la perdre. Il ne leur arrive jamais rien. Ces deux là sont parfaits pour ses filles.
Mais, à peine mariés à ses filles, le destin s’acharne et le malheur s’abat alors sur les deux familles et leurs descendants. Comme si fréquenter les Coste portait malheur. Génération après génération, le malheur continue de progresser. Jusqu’à Julie. Julie est belle, mais sa famille et son passé est malheureusement connu de tous. Elle est alors victime de moqueries et autres méchancetés qui finiront par la défigurer. Elle finit par s’isoler de tous jusqu’à l’arrivée de Mr Joseph au moulin de Pologne.
Le récit nous est raconté par un narrateur extérieur, qui semble bien connaître la famille actuelle qui vit au Moulin de Pologne. Pendant une bonne partie du récit, nous ignorons de qui il s’agit, il nous relate juste le destin tragique de cette famille depuis plusieurs générations. Sur la toute fin, nous comprenons qu’il s’agit certainement d’une sorte de notaire ou de conseiller familial.
Le Destin et méchanceté
Jean Giono nous décrit ici la méchanceté et la médiocrité des gens. Le narrateur en fait lui-même partie, notamment pendant la scène du Bal où les gens se moquent sans aucune gène de Julie qui ne cherche qu’à danser malgré son visage défiguré. Le narrateur se pose en tant qu’observateur qui jamais n’interviendra pour stopper la méchanceté des autres. On retrouve de nos jours ces personnes qui préfèrent filmer un événement pour le poster sur les réseaux sociaux par la suite, plutôt que d’agir ou réagir et venir en aide aux victimes.
Jean Giono se questionne sur le Destin au travers de son roman. Peut-on le défier, le modifier ? Celui-ci est-il l’oeuvre d’une divinité suprême et si oui, pourquoi s’en prendre à certains et pas à d’autres ? Il lie d’ailleurs le destin (fictif) tragique de cette famille à certains événements du monde réel. Notamment, l’accident du « train de Versailles », le 8 mai 1842. Accident dans lequel Dumont Durville, célèbre explorateur, périra. Nous n’avions jusqu’alors aucune date précise, ce qui rendait ce récit intemporel. Jean Giono insère donc ses personnages dans un événement historique, dont ils seraient la cause. De par leur malchance, ils entraînent avec eux tous ceux qui les cotoient, de près ou de loin. Telle une épidémie, le Destin des Coste semble se transmettre à quiconque s’approche d’eux.
Enfin, je pensais trouver dans ce roman beaucoup de descriptions. Jean Giono est tout de même connu pour ses descriptions de paysages provençaux. Ici, nous n’avons que très peu de descriptions. Seuls les personnages et leur histoire nous importent. Le moulin de Pologne lui-même est très peu décrit, ce sont ses habitants qui sont concernés.
Le moulin de Pologne reste un roman très particulier malgré l’écriture très marquante de Jean Giono. C’est un roman très sombre, dans lequel les malheurs s’enchaînent les uns après les autres. Je m’attendais à autre chose, et je lirai donc un autre de ses romans. Il semblerait que celui-ci se démarque de ses autres récits.
Mes challenges
Cette lecture m’a permis de valider la catégorie 58 du challenge annuel proposé sur Facebook. Lire le livre le plus anciennement édité de sa bibliothèque. Mon édition date de 1961.
Je pense que je n’ai lu que « l’homme qui plantait des arbres » il y a trèèèès longtemps et je n’ai pas aimé.
Celui-ci, je ne le connais pas du tout.
Un jour, je retenterai l’expérience…